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Ici
en France, j'achète ma terre conditionnée en sacs plastique
et prête à l'emploi. Mais au Ghana, un camion déversait un tas
de terre desséchée et brute à côté du portail de l'atelier de
Francis. Il fallait la purifier des petits cailloux, brins de
végétation et autres débris. Il fallait également la sécher
à une consistance utilisable. Ensuite elle était malaxée pour
la rendre uniforme. Il fallait conserver, dans des conditions
optimales, cette terre rendue conforme à un travail de qualité
mais Il était difficile de trouver des grands sacs en plastique
pour garder sa juste humidité. En effet, il n'y a aucun système
de collection d'ordures au Ghana, donc les sacs poubelles nous
manquaient. En conséquence, les Ghanéens préparent au coup par
coup, la quantité de terre qu'ils envisagent d'utiliser immédiatement.
La terre que j'utilisais devait être mise dans de légers sacs
plastiques de provisions. Il fallait veiller à ce que ces sacs
restèrent hermétiques parce qu'avec la chaleur, l'argile se
desséchait très rapidement.
La chaleur ? Ah oui, parlons s'en ! Je travaillais sur le littoral
près d'Accra, la capitale du Ghana située presque sur l'équateur
où l'air y est généralement chaud et humide. Le seul répit d'humidité
est quand venait un souffle du nord, d'un vent provenant directement
du Sahara. Ce vent sec est nommé " l'Harmattan ".
Malgré la présence de ce vent, la chaleur y est la même mais
on se sent plus à l'aise car on transpire moins. Cependant,
l'Harmattan asséchait la terre tellement vite qu'elle formait
une croûte qui se fissure constamment rendant le modelage impossible.
Ce problème affectait également certaines de mes pièces modelées
qui demandaient à sécher lentement. Je m'efforçais sans trop
de succès, de protéger mes pièces avec les quelques feuilles
plastiques disponibles. Les petites pièces séchaient trop rapidement
mais ont finalement survécu à ce processus indésirable grâce
à leur petite taille. Lors d'une conversation avec un céramiste
du nord du Ghana où l'air est plus sec que sur la côte, celui-ci
m'indiqua son astuce pour déjouer les effets de la sécheresse
de l'air. Il fermait portes et fenêtre et suspendait au plafond
des draps mouillés pendant que leur base trempait constamment
dans des seaux d'eau. Ce dispositif d'humidification de l'air
était approprié car il utilisait une terre très chamottée* résistant
bien à un séchage rapide.
Lorsque le jour de l'ouverture de l'exposition à l'Alliance
Française fut venu, Francis et moi-même avons chacun prononcés
un discours sur la collaboration culturelle pour une meilleure
compréhension du monde. Nous fûmes filmés et interviewés par
la télévision destinée à une diffusion matinale. Malgré toute
l'attention et le sérieux que portait Francis à l'organisation,
les imprimeurs firent une erreur de date sur les documents promotionnels
de l'exposition et pour couronner le tout, l'annonce télévisuelle
de l'ouverture fut diffusée trop tard. J'avais déjà quitté le
Ghana depuis la veille, date de la fermeture de l'exposition
! Il va sans dire que l'exposition n'a pas eu l'affluence qu'elle
méritait. Autres aléas : je faisais quelques fois des démonstrations
de modelages d'animaux la journée qui furent mystérieusement
détruits la nuit. L'exposition était pourtant gardée par un
vigile...
Malgré quelques frustrations passagères, mon séjour fut néanmoins
agréable. Il reste dans ma mémoire comme une expérience merveilleuse
et fascinante. |
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